Un nouveau site web d'information à Sherbrooke cache l'identité de ses journalistes, invente certaines de ses entrevues et semble avoir tenté d'usurper l'identité d'un journaliste de La Tribune, a découvert le 107,7 Estrie. Le Journal de Sherbrooke, a ne pas confondre avec le défunt journal de Québécor en région, se défend d'agir de façon non éthique.
Le site web du Journal de Sherbrooke présente de nombreux articles, signés par différents journalistes. Tous ceux que nous avons répertoriés possèdent une photo de profil générés par l'intelligence artificielle (IA).
Du lot, le plus intriguant se nomme Tommy Brodeur, un «journaliste» judiciaire qui reprend presque intégralement le nom du journaliste judiciaire de La Tribune, Tommy Brochu. Sa photo de profil, générée par l'IA, s'apparente aussi énormément à celle de M. Brochu, un véritable humain.
Source: Capture d'écran
Interpellé par le 107,7 Estrie, Tim Gaudreau, qui est nommé comme président du Journal de Sherbrooke au Registraire des entreprises, n'a pas répondu à notre appel et notre message Facebook. M. Gaudreau est par ailleurs cet ancien participant de La Voix reconnu coupable de crimes conjuguaux.
Dans un courriel non signé, le Journal a confirmé que « Certaines signatures [de journalistes] peuvent être pseudonymes ou virtuelles, dans un souci de neutralité et de protection des collaborateurs réels. [...] Concernant la mention de Tommy Brodeur, il s’agit d’un profil rédactionnel virtuel créé pour représenter un style journalistique particulier au sein du journal».
«Il ne s’agit évidemment pas du journaliste de La Tribune, poursuit-on, ni d’une tentative d’usurpation. La ressemblance du nom est purement fortuite, et nous procéderons à un ajustement afin d’éviter toute confusion à l’avenir.»
Tommy Brochu, lui, y voit une ressemblance trop flagrante pour être fortuite.
«Non seulement je me suis reconnu, je croyais que c'était moi. [...] J'ai l'impression qu'en allant chercher un nom qui ressemble à Tommy Brochu, l'intention est de tromper les gens», dit-il en entrevue.
Cacher l'identité de journalistes contrevient aussi à l'article 4 du guide de déontologie de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ), rappelle la présidente de son comité régional Estrie-Montérégie, Sarah-Ève Charland.
«Nous ne sommes pas dupes. La ressemblance est frappante et dérangeante. C’est non seulement inconcevable d’usurper l’identité d’un journaliste qui pratique son métier dans les règles de l’art, mais un média ne peut pas publier du contenu journalistique en gardant cachée l’identité de ses rédacteurs ou même en créant de toutes pièces un journaliste virtuel. Exercer le métier de journaliste impose de grandes responsabilités et exige des journalistes d’être imputables», affirme-t-elle dans un communiqué
Une entrevue inventée
Le 107,7 Estrie a aussi été en mesure de confirmer qu'au moins une entrevue présentée par le Journal de Sherbrooke sur son site web est inventée. Il s'agit d'une analyse de David Lacoste, directeur du Musée d'histoire de Sherbrooke, présenté le 31 octobre dernier.
Contacté lundi, M. Lacoste assure ne pas avoir parlé à un média nommé Journal de Sherbrooke, se montrant même dans l'ignorance de son existence. Pourtant, il est cité de long en large dans un texte nommé «Sherbrooke, 50 ans de sondages».
Le Journal semble avoir fait sienne une entrevue de M. Lacoste sur nos ondes à ce sujet, sans donner le crédit et présentant l'entrevue d'une façon à faire croire que M. Lacoste lui avait parlé.
De son côté, le Journal assure que «Tous les contenus passent par un processus de vérification et de supervision humaine avant publication».