Le Commissaire à la langue française, Benoît Dubreuil, a publié mercredi un rapport mettant en évidence les défis et les dérives liés au recrutement des étudiants étrangers au Québec. Bien qu’il salue l’objectif du gouvernement d’augmenter le nombre d’étudiants francophones dans les établissements francophones, il estime que l’approche actuelle est insoutenable.
Historiquement, 40 à 45% des étudiants internationaux au Québec étudient en anglais et continuent généralement de fonctionner en anglais après l'obtention de leur diplôme.
Cependant, depuis 2021-2022, le Québec a connu une croissance très importante du nombre d'étudiants provenant d'Afrique francophone dans les collèges, les centres de formation professionnelle et les universités. Bien que ces étudiants soient « très, très francophones », cette hausse rapide a créé des difficultés majeures:
- Problèmes d'accueil et d'intégration.
- Intégrité des mécanismes d'immigration compromise.
- Cas de fraude et d'étudiants non préparés: certains arrivaient au Québec sans savoir dans quelle ville ou quel programme ils étaient inscrits, ayant confié leur dossier à un consultant.
- Après des resserrements dans les politiques d'immigration, les demandes d'admission, notamment en provenance d'Afrique, sont maintenant en «baisse rapide».
La faute aux intermédiaires et aux modèles d'affaires risqués
Monsieur Dubreuil pointe du doigt le rôle des intermédiaires en Afrique francophone qui gèrent la préparation des dossiers. Il mentionne des cas où 150 dossiers étaient payés avec la même carte de crédit, signalant clairement la présence d'un intermédiaire gérant un grand nombre d’étudiants.
De plus, la Commission dénonce les modèles d’affaires de certains établissements, particulièrement des collèges, qui se sont mis à fonctionner exclusivement sur le recrutement d’étudiants étrangers. Cette pratique est jugée trop risquée et non viable. La recommandation du Commissaire est claire : ne plus autoriser ces modèles d'affaires qui dépendent exclusivement du recrutement international.
Les solutions: Centraliser et préparer
Pour relancer la machine de manière plus sérieuse et durable, le Commissaire propose des correctifs concrets:
- Créer un consortium (sur le modèle de Campus France) pour centraliser tous les dossiers d'admission pour le Québec.
- Centraliser la promotion et la préparation des étudiants en Afrique francophone.
- Mettre en place des rencontres systématiques avec chaque candidat pour s'assurer de la validité du projet d'études et que les attentes sont au bon niveau.
- Systématiser les bonnes pratiques d'accueil déjà développées dans certains cégeps et universités à travers le Québec.
Pour Benoît Dubreuil, l'Afrique francophone est un « pôle de croissance du français » qui est stratégique, mais il est crucial de préparer les étudiants aux « écarts culturels » et « ajustements linguistiques » pour assurer une meilleure intégration.
Écoutez l’entrevue accordée aux animateurs Steve Roy et Valérie St-Jean.