Le Guide Michelin a oublié plusieurs bonnes tables québécoises dans sa récente publication.
Jean-Pierre Léger, ancien président de St-Hubert, critique l'impact du guide sur la gastronomie québécoise, soulignant que de nombreux restaurants méritants sont négligés, tandis que quelques-uns reçoivent des étoiles.
«On a des milliers de très bons restaurants. Donc c'est sûr que Michelin ne peut pas arriver tous les jours, toutes les semaines. Et tous ces restaurants-là, il y en a trop. » - Jean-Pierre Léger
De plus, il révèle que le Guide Michelin est subventionné par des fonds publics via Tourisme Montréal et d'autres entités, questionnant l'efficacité de ces investissements.
Écoutez l'entrevue accordée à l'animateur Jean-Sébastien Hammal.
M. Léger a publié une lettre ouverte pour ouvrir un débat essentiel sur l’avenir de notre gastronomie:
Le Guide Michelin : entre fierté et oubli
Par Jean-Pierre Léger
Ex-Président et chef de la direction du Groupe St-Hubert
Comme plusieurs, j’attendais avec impatience l’annonce des lauréats du Guide Michelin au Québec. Le 15 mai dernier, j’ai ressenti une immense fierté en voyant La Tanière à Québec recevoir deux étoiles. Bravo à tous les chefs et restaurants ayant reçu une étoile ou une mention : ces honneurs sont mérités.
Mais une fois l’euphorie retombée, une question s’impose : comment expliquer les nombreux oubliés?
Oublier Toqué du côté des étoilés, fondé par Normand Laprise, pionnier de la gastronomie québécoise moderne, reconnu pour son engagement envers les producteurs locaux et son excellence technique, me semble incompréhensible. Une ou deux étoiles auraient été méritées sans aucun doute. Même constat pour Le Mousso, d’Antonin Mousseau, ou Vin Mon Lapin, de Marc-Olivier Frappier, deux piliers créatifs de notre scène culinaire actuelle.
L’absence de Graziella dans le Guide Michelin, grande représentante de la cuisine italienne raffinée à Montréal, de Colombe Saint-Pierre à Rimouski (Bic), Parcelles, La Cabane d’à Côté, Alma, Le Chien Fumant... la liste des oubliés est trop longue pour un guide qui prétend refléter l’excellence.
Et pendant ce temps, on y retrouve le légendaire mais modeste Schwartz’s, classé dans la même catégorie que des institutions gastronomiques comme Bouillon Bilk, Hoogan et Beaufort, Le Clan, ou Montréal Plaza. Avec tout le respect que je dois à ce monument du smoked meat, les critères d’évaluation semblent ici manquer de cohérence.
Ce décalage m’amène à une réflexion plus large : qui comprend vraiment la gastronomie québécoise? Qui en défend la richesse, la diversité, les artisans?
Il y a au Québec des gens qui travaillent d'arrache-pied pour faire briller les talents d'ici.
Parmi eux, Élise Tastet, entrepreneure passionnée et fondatrice de Tastet, le fait avec rigueur, sensibilité et une connaissance du terrain que peu possèdent depuis 12 ans. Son guide met de l’avant plus de 900 établissements indépendants d’ici, sans palmarès ni jugement élitiste, mais avec un souci constant de bien orienter les gens vers les bonnes adresses selon leurs goûts, leur budget et l'occasion de sortie. Comme d'autres, elle mérite d’être soutenue.
Le Guide Michelin a reçu plus de 2,1 millions de dollars en fonds publics, notamment via Tourisme Montréal, Destination Québec cité, les villes de Montréal et de Québec, Développement économique Canada et l’Alliance touristique du Québec.
Il serait temps que les mêmes organismes soutiennent également nos talents locaux, comme Tastet, le magazine Caribou et Dinette, sans oublier les critiques gastronomiques du samedi de La Presse +.