Le gouvernement Legault a confirmé qu’il mettra fin en décembre au financement du projet pilote des travailleurs de proximité, lancé en 2022 à la suite des recommandations de la Commission Laurent. Une décision qui soulève un tollé dans le milieu communautaire.
Dans une lettre publiée dans le Journal de Montréal, 92 signataires, incluant des gestionnaires d’organismes et des experts universitaires, dénoncent cette décision jugée incohérente, alors que les besoins en soutien familial ne cessent d’augmenter.
Ces travailleurs de proximité, déployés dans 14 régions, jouaient un rôle clé: rejoindre les familles vulnérables, souvent isolées, parfois issues de l’immigration, et les raccrocher aux services publics. «C’était un pont essentiel entre les communautés et les ressources», résume Alex Gauthier, directeur de la Fédération des organismes communautaires Famille.
Le programme, bien que temporaire, s’était révélé efficace. La professeure Annabelle Berthiaume de l’Université de Sherbrooke rappelle que la Commission Laurent réclamait justement davantage d’investissement en prévention. «La protection de la jeunesse ne doit pas être la porte d’entrée vers les services. Elle doit rester un dernier recours», souligne-t-elle.
En région, les conséquences sont concrètes. À Coaticook, l’organisme La Maison de la famille devra absorber une coupure de 55000$ dès 2025. «On parle de 150 familles accompagnées chaque année, 2500 contacts directs, mais il faut huit sources de financement pour maintenir une seule ressource à temps plein», déplore la directrice Corinne Hamelin. Cet été, pour la première fois en huit ans, le service a été suspendu pendant deux mois faute de budget.
Le ministère de la Famille reste vague sur les raisons de cette coupure, bien qu’il soit clair que des compressions budgétaires en soient à l’origine. Plusieurs espèrent une volte-face de la nouvelle ministre, Suzanne Roy, ou de son éventuelle successeure, Chantal Jourdain-Champagne.
Pour bien des intervenants, la fin du programme est un non-sens. «C’est une vision à court terme, qui risque de coûter plus cher à long terme, tant sur le plan humain qu’économique», conclut Jean-François Desaulniers.
Écoutez le dossier du journaliste Jean-François Desaulniers.