Dans la tourmente après les révélations du 107,7 Estrie sur des vols d'informations à d'autres médias et la possible usurpation de l'identité d'un journaliste de La Tribune grâce à l'intelligence artificielle (IA), le propriétaire du Journal de Sherbrooke, Tim Gaudreau, brise le silence et se défend d'agir de façon à contrevenir aux bonnes pratiques journalistiques.
Notre dossier à ce sujet, diffusé lundi, a fait grand bruit : depuis, plusieurs médias, dont La Presse et La Tribune, ont mentionné s'être fait subtiliser du contenu original par le Journal de Sherbrooke, un nouveau site d'information sherbrookois.
Par ailleurs, le journaliste de La Tribune Tommy Brochu, dont l'identité semble avoir été usurpée par le média grâce à l'IA, a porté la situation auprès de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) et le Conseil de presse du Québec.
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En entrevue dans L'Estrie aujourd'hui, le propriétaire du média, Tim Gaudreau, a réfuté chaque critiques formulées à l'endroit des agissements du Journal dans les derniers jours.
Il a notamment défendu le choix de son entreprise d'utiliser des profils générés par IA plutôt que de présenter le vrai visage des journalistes qu'il assure avoir à son emploi. Selon le guide de déontologie de la FPJQ, une telle pratique contrevient à l'exigence qu'ont les journalistes de pratiquer leur travail à visage découvert, mais M. Gaudreau voit la situation autrement.
«Mon point de vue, c'est que dans un environnement médiatique, souvent il y a les biais personnels, les émotions, les appartenances politiques ou les opinions qui peuvent influencer la perception de l'information. Moi, je vois l'IA comme un outil d'impartialité réel», dit-il.
Par ailleurs, M. Gaudreau assure que le profil de journaliste IA Tommy Brodeur, qui ressemble beaucoup au journaliste Tommy Brochu, est né d'un malentendu et qu'il n'y a pas eu d'intention de son média d'usurper l'identité de M. Brochu.
Le profil de Tommy Brodeur n'existe d'ailleurs plus, comme tous les autres profils de journalistes générés par IA qui étaient au départ sur son site web.
Source: Capture d'écran
Plagiat
Tim Gaudreau s'est aussi défendu de s'adonner au plagiat, alors que plusieurs médias ont indiqué, dans les derniers jours, avoir vu leur contenu se retrouver sur le site web du Journal de Sherbrooke.
C'est le cas d'une entrevue de David Lacoste, du Musée d'histoire de Sherbrooke, sur nos ondes, dont les propos ont été repris par le site sans mention, de sorte qu'un lecteur non avisé pouvait penser sans problème que le Journal avait parlé à M. Lacoste.
À la demande de ce dernier, ses propos ont été retirés du site web récemment.
Sur LinkedIn, l'éditeur adjoint et vice-président à l'information de La Presse, François Cardinal, a écrit que le journal «publie, sous de fausses identités, de fausses entrevues et des textes plagiés à La Presse et ailleurs, et on se présente non seulement comme un média crédible, mais ''à visage humain''. C’est du vol de crédibilité».
Pour M. Gaudreau, il n'en est rien. Selon lui, son média ne fait que reprendre des «déclarations publiques» de personnalités dans d'autres médias. Bien qu'il arrive qu'un média cite un intervenant qui s'est exprimé chez un concurrent, une mention le disant explicitement se retrouve toujours dans le texte. Il en va d'un autre article du code de déontologie de la FPJQ, qui note que «les journalistes ne doivent pas se livrer au plagiat. S’ils reprennent une nouvelle exclusive qui vient d’être publiée ou diffusée par un autre média, ils doivent en identifier la source».